C’est en terre chaouïa, et plus précisément à Boudhérem, proche de la bourgade de Khenchela que Mahboubi Tir est né en 1915. En langue arabe, tir signifie « oiseau » et mahboubi « bien-aimé », comme un présage de ce que la mémoire des habitants du Grand Saint-Barthélemy retiendra de lui. À la fin des années 1950, Mahboubi Tir s’installe dans le quartier de Saint-Barthélemy, au nord de Marseille. Il a au départ tenu un commerce dans le plus grand bidonville de Marseille où les clients sont principalement les résidents Algériens. Au début des années 1960, de grands ensembles d’habitat collectif et social, désignés sous le nom de ZUP n° 1, sont édifiés à l’emplacement du bidonville. M. Tir quitte alors les lieux et installe sa nouvelle boutique quelques dizaines de mètres plus loin, près du futur centre urbain du Merlan. La construction du centre urbain (1975-1976) l’oblige à nouveau à déplacer sa boutique. En contrepartie, on lui propose un espace dans la galerie marchande qu’il refuse, envisageant l’éthique de son métier strictement dans une dimension humaine. Il s’installe alors dans le carré de la Busserine, une dénomination de la population pour désigner une construction ayant la forme d’un carré où sont regroupés plusieurs commerces de base : boulangerie, libre-service, etc.
Il sera durant plus de quarante ans le commerçant de plusieurs générations d’habitants. M. Tir est le garant de la transmission intergénérationnelle et le couturier des relations sociales. Il participera tout au long de sa vie à nourrir le terreau d’une solidarité et la prise de soin de chaque personne qu’il rencontrera.
M. Tir décède en 1997, le quartier du Grand SaintBarthélémy s’est transformé par les multiples rénovations sociales et urbaines mais les combats et désirs d’affirmer sa dignité dans un quartier ségrégué et relégué reste intact. Le 1er juillet 2004 à Marseille, le boulevard Jourdan prolongé a été officiellement renommé rue Mahboubi Tir, fruit d’années de travail et de mobilisations pour réhabiliter la mémoire de ce grand personnage [1].
